La location saisonnière est une pratique très répandue, notamment dans les grandes villes touristiques comme Paris. Cependant, elle est encadrée par une législation stricte, surtout lorsqu’il s’agit de résidences secondaires. Une récente décision de la Cour de cassation, en date du 11 juillet 2024 (pourvoi n° 23-13.789), apporte un éclairage intéressant sur les obligations des propriétaires concernant la mise en location saisonnière d’un bien immobilier et les critères pour déterminer si celui-ci constitue ou non leur résidence principale. Cet arrêt met en cause un couple de propriétaires qui louait régulièrement un appartement parisien en location saisonnière sans avoir demandé l’autorisation requise. Ce cas soulève des questions essentielles quant à la définition de la résidence principale, les règles spécifiques de location saisonnière à Paris, et les sanctions encourues en cas de non-respect des règles.

La distinction entre résidence principale et résidence secondaire

En droit français, la distinction entre résidence principale et résidence secondaire est primordiale, notamment pour l’application des règles en matière de location saisonnière. La résidence principale est définie comme le logement où une personne réside habituellement et effectivement pendant au moins 8 mois par an (article R. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation). Il s’agit du domicile fiscal et du lieu de résidence stable et permanent.

Dans l’affaire en question, un couple de propriétaires louait leur appartement parisien en location saisonnière tous les week-ends, entre janvier 2015 et octobre 2019. Bien que l’un des époux occupât cet appartement quatre jours par semaine pour ses besoins professionnels à Paris, la famille était établie en Bretagne. La question qui s’est posée devant les juges était donc de savoir si cet appartement pouvait être considéré comme leur résidence principale, ce qui aurait permis de contourner certaines obligations liées à la location saisonnière.

Les propriétaires ont fait valoir que l’appartement parisien servait de résidence principale à l’un des époux, mais la justice, puis la Cour de cassation, ont estimé que cette occupation ne répondait pas aux critères légaux. En effet, les juges ont considéré que l’occupation de l’appartement à hauteur de 208 jours par an était insuffisante pour le qualifier de résidence principale, la loi exigeant une occupation de 240 jours (8 mois) par an pour justifier cette qualification. La résidence principale du couple était donc bien leur domicile en Bretagne, et non l’appartement parisien.

Les règles encadrant la location saisonnière à Paris

La location saisonnière, à Paris notamment, est soumise à une réglementation stricte, en raison de la pression foncière importante et des impacts négatifs que peut avoir le développement de ce type de location sur l’offre de logements. L’article L. 631-7 du Code de la construction et de l’habitation impose aux propriétaires qui souhaitent louer leur logement en location saisonnière, dès lors que celui-ci ne constitue pas leur résidence principale, de demander une autorisation préalable de changement d’usage.

Cette autorisation est indispensable pour toute location meublée de courte durée répétée dans l’année lorsque le bien n’est pas occupé à titre de résidence principale. Dans les grandes villes comme Paris, cette règle vise à limiter la transformation de résidences secondaires en logements touristiques, ce qui contribue à la pénurie de logements accessibles aux habitants permanents. En effet, la multiplication des locations saisonnières, notamment via des plateformes comme Airbnb, est souvent accusée d’aggraver la crise du logement dans les métropoles.

En l’espèce, le couple de propriétaires n’avait pas sollicité cette autorisation préalable. La Ville de Paris a donc assigné le couple pour avoir mis en location leur appartement sans respecter cette formalité. Les juges ont donné raison à la municipalité, considérant que l’appartement parisien ne pouvait être qualifié de résidence principale et que la location saisonnière avait été effectuée sans respecter les obligations légales.

La notion de résidence principale en droit immobilier

La résidence principale revêt une importance capitale en droit immobilier et fiscal. La qualification d’un bien immobilier comme résidence principale permet notamment d’échapper à certaines contraintes et régulations en matière de location saisonnière. Cette notion est également primordiale pour déterminer l’application de certains avantages fiscaux, comme l’exonération de la plus-value lors de la vente d’un bien immobilier.

Dans ce cas, les juges ont retenu plusieurs éléments pour déterminer que l’appartement parisien ne constituait pas la résidence principale des propriétaires :

  • La durée d’occupation : L’époux occupait le bien 208 jours par an, soit moins que les 240 jours requis pour que le logement soit considéré comme une résidence principale.
  • La déclaration fiscale des revenus : Le couple avait déclaré leur domicile en Bretagne comme leur résidence principale, ce qui a été un indice supplémentaire pour la justice.
  • La fréquence des locations saisonnières : Le fait de louer le bien toutes les fins de semaine a montré une volonté de l’exploiter comme une résidence secondaire destinée à générer des revenus locatifs.

Ces critères ont conduit les juges à conclure que l’appartement parisien ne remplissait pas les conditions pour être qualifié de résidence principale, justifiant ainsi la nécessité d’une autorisation préalable pour la location saisonnière.

Les sanctions pour non-respect de la réglementation sur les locations saisonnières

Le non-respect des règles encadrant la location saisonnière peut entraîner des sanctions importantes. Les propriétaires qui ne respectent pas l’obligation de demander une autorisation de changement d’usage peuvent être sanctionnés par des amendes pouvant aller jusqu’à 50 000 euros, selon l’article L. 651-2 du Code de la construction et de l’habitation. En outre, les juges peuvent ordonner la remise en état des lieux, c’est-à-dire la cessation de la location saisonnière.

Dans cette affaire, la Ville de Paris a poursuivi les propriétaires pour non-respect de cette obligation, et la Cour de cassation a confirmé la décision des juges du fond, validant ainsi l’application de sanctions à l’encontre des propriétaires. Cet arrêt illustre la rigueur des juridictions dans l’application de la législation sur les locations saisonnières, particulièrement dans les zones où l’accès au logement est difficile.

Conclusion

Cet arrêt de la Cour de cassation du 11 juillet 2024 est un rappel des règles strictes qui encadrent la mise en location saisonnière dans les grandes villes comme Paris. Lorsque le logement ne constitue pas la résidence principale des propriétaires, une autorisation préalable de changement d’usage est obligatoire sous peine de sanctions. Les propriétaires doivent être particulièrement vigilants quant à la définition de leur résidence principale, car celle-ci impacte directement leurs obligations légales en matière de location saisonnière. La Ville de Paris, en particulier, reste très active dans la lutte contre les locations non déclarées, ce qui expose les propriétaires à des contrôles fréquents et à des poursuites en cas de manquements. Il est donc essentiel pour les propriétaires de s’informer et de respecter les règles locales avant de se lancer dans la location saisonnière.

Cour de cassation, 3ᵉ chambre civile, 11 juillet 2024, pourvoi n° 23-13.789

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