Dans un arrêt récent en date du 6 juillet 2023, la Cour de cassation a statué sur une affaire portant sur la résiliation d’un bail commercial dans un immeuble en copropriété, mettant en lumière les conditions strictes requises pour invoquer l’exception d’inexécution. L’arrêt, émanant de la 3ᵉ chambre civile de la Cour de cassation, sous le pourvoi n° 22-15.923, a apporté des éclaircissements cruciaux quant à l’application de l’article 1719 du Code civil et aux implications de l’exception d’inexécution dans le domaine locatif.

Contexte du litige en bail commercial et consignation de loyer

Un bailleur avait donné en location un local à usage commercial situé dans un immeuble soumis au statut de la copropriété. Le locataire était accusé de manquements contractuels, ce qui avait conduit le bailleur à l’assigner devant les tribunaux en vue de résilier le bail, d’expulser le locataire et de réclamer une indemnité d’occupation.

En réponse à ces accusations, le locataire avait sollicité l’autorisation de consigner les loyers en raison des infiltrations d’eau dans les locaux, qu’il attribuait à une inexécution de l’obligation de délivrance par le bailleur. Cette demande avait été acceptée par les juges de première instance.

Décision de la Cour de Cassation : Interprétation de l’article 1719 du Code civil

La Cour de Cassation a fondé sa décision sur l’article 1719 du Code civil qui prévoit que l’exception d’inexécution ne peut être retenue que si le trouble invoqué rend le bien loué impropre à l’usage auquel il est destiné. Dans le cas présent, la Cour de Cassation a relevé qu’il n’avait pas été démontré de manière suffisante que les infiltrations d’eau alléguées avaient rendu le local impropre à son usage commercial. Par conséquent, elle a censuré la décision des juges de première instance.

Implications et portée de l’arrêt sur l’exception d’inexécution dans le bail commercial

L’arrêt du 6 juillet 2023 met en avant l’importance des critères stricts qui doivent être satisfaits pour invoquer l’exception d’inexécution. Selon la Cour de Cassation, le trouble ou le manquement invoqué doit rendre le bien loué complètement impropre à l’usage auquel il est destiné. Les simples désagréments ou les troubles mineurs ne sont pas suffisants pour justifier l’application de cette exception.

Ce faisant, la Cour de Cassation réaffirme la nécessité d’une approche équilibrée entre les droits et obligations du bailleur et du locataire. Si le locataire peut invoquer l’exception d’inexécution pour des problèmes majeurs affectant l’usage du bien loué, il ne peut le faire pour des problèmes mineurs qui n’entravent pas significativement cet usage.

Cette décision contribue à clarifier les contours de l’exception d’inexécution dans le domaine locatif et renforce l’équilibre entre les droits et obligations contractuelles des parties.

Cour de cassation, 3ᵉ chambre civile, 6 juillet 2023, pourvoi n° 22-15.923