La transformation d’un bien immobilier peut soulever des questions complexes en matière de droit de l’urbanisme, en particulier lorsqu’il s’agit de changements de destination des bâtiments. Dans un arrêt rendu le 3 septembre 2024 (pourvoi n° 23-85.489), la Cour de cassation a rappelé l’importance de respecter les règles d’autorisation d’urbanisme, y compris lorsque la transformation se fait sans travaux. Cet arrêt concernait un propriétaire ayant acheté un immeuble destiné à un usage hôtelier, qu’il avait ensuite transformé en logements meublés ainsi qu’en mobil-homes installés sur le terrain. Sans avoir procédé à la déclaration préalable requise, il a été poursuivi en justice pour avoir modifié la destination de l’immeuble.
Cette décision met en lumière l’importance des autorisations d’urbanisme dans les projets de transformation des bâtiments et les risques encourus en cas de non-respect des règles en la matière. Cet article revient sur les notions clés soulevées par cet arrêt et explique les obligations imposées aux propriétaires en matière de changement de destination.
Qu’est-ce qu’un changement de destination ?
Le changement de destination d’un bâtiment est une notion fondamentale en droit de l’urbanisme. Il désigne le passage d’une catégorie d’utilisation à une autre sans nécessairement modifier l’aspect extérieur du bâtiment. En France, les destinations des constructions sont définies par le Code de l’urbanisme (article R. 151-27), qui répartit les constructions en plusieurs catégories principales : habitation, exploitation agricole et forestière, commerce et activités de service, équipement d’intérêt collectif, activités industrielles ou artisanales, entrepôts, etc.
Dans le cas qui nous intéresse, le bâtiment en question était destiné à un usage hôtelier, c’est-à-dire qu’il relevait de la catégorie « commerce et activités de service ». En décidant de louer cet immeuble en meublé, ainsi que plusieurs mobil-homes sur le terrain, le nouveau propriétaire a opéré un changement de destination vers l’habitation, ce qui constitue un passage d’une catégorie d’utilisation à une autre. Ce changement est soumis à une réglementation stricte et nécessite une autorisation préalable.
L’importance des autorisations d’urbanisme en cas de changement de destination
La réglementation des autorisations d’urbanisme vise à garantir que les transformations d’usage des biens immobiliers respectent les plans d’urbanisme locaux et les objectifs de développement du territoire. Dans certaines communes, le changement de destination d’un bien immobilier est soumis à une déclaration préalable ou à l’obtention d’un permis de construire. Cette obligation s’applique indépendamment de l’existence de travaux. C’est l’un des points centraux soulevés par cet arrêt.
En effet, le propriétaire mis en cause a soutenu devant les juges que l’infraction ne pouvait être constituée qu’en présence de travaux entraînant ce changement de destination. Selon lui, puisqu’aucun travail de transformation n’avait été effectué, il n’était pas tenu de solliciter une autorisation d’urbanisme. Toutefois, la Cour de cassation a rejeté cet argument en rappelant que l’article L. 421-1 du Code de l’urbanisme prévoit que certains changements de destination nécessitent une déclaration préalable, même en l’absence de travaux.
Ainsi, la simple modification de l’usage d’un bâtiment, sans travaux, peut suffire à constituer une infraction si elle n’est pas précédée des démarches administratives adéquates. Dans ce cas précis, le bâtiment avait été acheté avec une destination hôtelière. Le fait de le transformer en locations à des fins d’habitation pérenne constituait un changement de destination qui, en l’absence de déclaration préalable, constituait une infraction au regard des règles d’urbanisme.
L’exploitation d’un bien immobilier : entre mise en sommeil et changement de destination
Un autre point soulevé par cette affaire concerne la notion de mise en sommeil de l’activité. L’intéressé avait soutenu que, bien que l’immeuble soit affecté à un usage hôtelier lors de son acquisition, l’activité de l’hôtel n’avait pas été effectivement exercée à la suite de l’achat. En d’autres termes, l’hôtel aurait été en mise en sommeil, ce qui, selon lui, le dispensait de faire une déclaration préalable pour l’utiliser à des fins d’habitation.
La Cour de cassation a rejeté cet argument en rappelant que la mise en sommeil d’une activité n’équivaut pas à un changement de destination. En effet, tant que l’usage hôtelier du bâtiment est inscrit comme destination officielle dans les documents d’urbanisme, cette destination doit être respectée. La mise en sommeil de l’activité ne change pas la destination du bien et ne dispense donc pas le propriétaire de ses obligations légales en cas de changement d’usage.
Le propriétaire aurait donc dû procéder à une déclaration préalable avant de transformer cet hôtel en logements meublés. En ne le faisant pas, il a contrevenu aux règles d’urbanisme en vigueur, et l’infraction était donc constituée.
Mobil-homes et changement de destination : une problématique particulière
Dans cette affaire, en plus du bâtiment principal, le propriétaire avait également loué plusieurs mobil-homes installés sur le terrain de l’hôtel. Cette pratique soulève une autre problématique en matière de droit de l’urbanisme, à savoir celle de l’installation de structures mobiles à des fins d’habitation.
L’installation de mobil-homes sur un terrain est soumise à une réglementation spécifique. En effet, si les mobil-homes peuvent être installés temporairement sur des terrains de camping ou des parcs résidentiels, leur installation sur un terrain privé pour un usage d’habitation nécessite une autorisation d’urbanisme. En l’espèce, la location de mobil-homes en tant qu’habitations permanentes, sans autorisation préalable, pourrait également être considérée comme un changement de destination du terrain, impliquant une modification de l’usage du sol.
La Cour de cassation n’a pas spécifiquement évoqué cet aspect dans son arrêt, mais il est probable que l’installation des mobil-homes sur le terrain de l’hôtel ait également été prise en compte par les juges pour caractériser l’infraction au regard des règles d’urbanisme.
Les risques encourus en cas d’infraction aux règles d’urbanisme
Les propriétaires qui contreviennent aux règles d’urbanisme en ne respectant pas les obligations liées aux changements de destination s’exposent à des sanctions. Ces sanctions peuvent prendre plusieurs formes, notamment des amendes, des peines d’emprisonnement, ou encore la démolition des travaux ou la réaffectation du bien à son usage initial.
Dans cette affaire, l’intéressé a été poursuivi pour avoir opéré un changement de destination sans déclaration préalable. La Cour de cassation a confirmé que l’infraction était constituée, ce qui expose le propriétaire à des sanctions potentielles, tant sur le plan pénal que sur le plan administratif.
Conclusion
Cet arrêt du 3 septembre 2024 constitue un rappel important des règles qui s’appliquent en matière de changement de destination des biens immobiliers. Lorsqu’un propriétaire souhaite modifier l’usage de son bien – qu’il s’agisse de transformer un hôtel en logements meublés, ou d’utiliser des mobil-homes à des fins d’habitation permanente – il est tenu de se conformer aux règles d’urbanisme en vigueur et de procéder aux déclarations ou demandes d’autorisation nécessaires.
Le respect des procédures d’urbanisme est essentiel pour garantir une utilisation harmonieuse des sols et des bâtiments, et les infractions en la matière peuvent entraîner des sanctions lourdes. Il est donc vivement recommandé aux propriétaires de se renseigner auprès des services d’urbanisme de leur commune avant de procéder à toute transformation de leur bien, afin d’éviter les risques de contentieux et de sanctions.
Cour de cassation, chambre criminelle, 3 septembre 2024, pourvoi n° 23-85.489
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